Samedi, 2h50 du mat, voilà ça y est on y est! Dans 10min, une belle journée s’annonce avec la Maxi-Race et le tour du lac d’Annecy par les cîmes. Raph, JL (l’inattendu) et moi sommes avec le dossard, Sandrine et Luc là pour nous encourager. Avec Raph et JL, nous nous dirigeons vers le sas de départ. Désirant éviter de partir à fond comme d’habitude, j’invite JL à ne pas trop s’approcher du début de la file. Quant à Raph « bon, je vous laisse, je vais devant »… ça y est Raph annonce la couleur…
Première partie: Annecy-le-Vieux > Sommet du Semnoz
2 min avant le départ, nous avons droit à un super briefing: « Merci d’être présents. Nous tenions à remercier tous nos partenaires et aussi nos élus. Bon, bah… voilà… On va y aller… ». Ok… 3h, c’est parti! Enfin… devant, c’est parti… Pour JL et moi, le départ se fait en marchant le temps que la masse des 1700 partants s’allonge sur l’avenue d’Albigny. Après 2min nous passons enfin la ligne de départ, nous croisons Sandrine et Luc qui reçoivent en pleine figure la polaire de JL (il ne m’a pas cru quand je lui ai dit qu’il aurait vite chaud). Contrairement à il y a 2 ans, je ne me retrouve pas derrière Raph à courir comme une balle avec les 30 premiers et à me flinguer pour le restant de la course. Cette fois-ci, je suis JL à la trace. Il a un super rythme et remonte peu à peu tout le monde. Nous arrivons très vite aux Marquisats, puis à la montée menant à la Visitation. Cette montée, c’est le genre de montée où tu peux te faire exploser le cardio en 2 secondes, comme moi il y a 2 ans. Mais pas cette année, je prends le relais de JL et sans le vouloir je le distance un peu et remonte cette pente à bon allure qui me fait doubler plusieurs personnes. Bref, départ au top, JL m’a amené ici comme dans un fauteuil. Merci! Mais très vite le chemin du Périmètre au dessus de la Visitation arrive. Après quelques mètres, JL et ses cannes de 3m de long me repasse devant; je me cale tout de suite derrière lui. ça bouchonne un peu, on se fait doubler, on double, mais je ne lâche pas JL d’une semelle! On arrive alors très vite au dessus des Puisots et bientôt au Pas de l’Âne. Ces chemins je les connais par coeur, la pente diminue et après 3 petites montées, ça descend. J’accélère alors, redouble JL et lâche un peu les watts, mais sans plus. J’arrive très vite au croisement avec la route où Sandrine et Luc (et la cloche) sont là. Malheureusement à 4h du mat, ils ne sont pas trop réveillés et me remarquent à peine. Peu de temps après, au profit d’une pause technique, JL me rejoint. Là encore, je lui emboîte le pas et le suis à la trace. Malheureusement pour moi, nous sommes sur une piste, ça ne bouchonne plus: la machine JL est en marche, ça va trop vite pour moi et je ne suis pas décidé à monter dès maintenant en sur-régime: la montée du Semnoz doit se faire à l’économie et je laisse donc partir JL.
J’arrive au sommet du Semnoz à 5h50 où nous avons droit à un super lever de soleil au dessus d’une mer de nuages; le genre de lever où tu te dis que le réveil à 1h30 du mat en valait bien la peine! Je croise vite fait Sandrine et Luc, toujours pas bien réveillés qui me perdent dans le ravito (et j’apprendrai plus tard qu’ils ont loupé JL qui était 5min devant moi…). Je comptais prendre un « bon repas » à base de charcuterie, de fromage, de banane et de coca. Malheureusement il n’y a pas de charcuterie, le fromage est une super tome des Bauges, mais elle est un peu lourde à manger. Je mange un peu et prend un petit stock dans le sac. Je ne le sais pas encore, mais je commets ma première erreur: il aurait fallu que je mange bien plus et que je prenne plus de fromage dans mon sac. Mais là, il est 5h50, mon planning « au mieux » me faisait arriver à 6h et je suis complètement frais!
Deuxième partie: Sommet du Semnoz > Doussard
Cette deuxième partie je la connais moins bien mais je l’ai repéré il y a 3 semaines. D’abord une descente sur le col de Leschaux. La première partie est roulante, je lâche les chevaux. La deuxième partie est plus technique et en plus ce matin elle est assez glissante. Je ne descends pas trop à l’économie et laisse bien aller le corps tout en restant prudent. Résultat je fais une très bonne descente et arrive assez vite à Saint-Eustache. Saint-Eustache marque le début de la montée vers le col de la Cochette. Dans ma mémoire, il y a 3 semaines, les chemins étaient secs et il y avait 3 ou 4 vrais coups de culs. Je me souviens que j’avais aussi coulé une biele dans la dernière montée sous le col. Cette fois-ci, je me suis bien décidé à ne pas refaire la même erreur. J’essaie donc d’avancer à l’économie. Mais c’est dur, ça monte, il y a de la boue, je suis emporté par le flot de coureurs. Une descente au milieu de la montée me fait perdre complètement mes repères: où en suis-je ? Le parking ne devrait-il pas être là ? … Bref, j’arrive au col un peu vidé et m’arrête 100m plus loin pour manger (chose que j’aurais dû faire bien avant, au Semnoz). Vu que nos dossards respectent un pseudo classement international, j’en profite pour regarder ceux qui passent devant. Ici un 300, là un 1500, un 700, un, deux relayeurs, un 200, deux ou trois 400. Avec mon dossard 1221, je percute que je ne suis peut être pas à ma place et que je suis avec des traileurs bien plus forts que moi. Je redécolle vite pour faire cette traversée de la Montagne d’Entrevernes. ça bouchone bien, je pourrais essayer de doubler mais vu le niveau théorique des autres trailers et vu que je suis en avance sur mon planning, je reste sagement dans le peloton, sans forcer.
Au dessus des Maisons, le chemin s’élargit, je me remets donc à courir mais je m’aperçois que mes deux genoux commencent à couiner. Il me reste encore 50km, il faut que ça tienne, je reste donc prudent et descend plus en marchant qu’en courant. Sauf qu’aux Maisons, l’un des points de passage le plus reculé du parcours, il y a une bonne cinquantaine de personnes à t’encourager. Alors forcément, ça donne la pêche, je me remets à courir. Juste après il y a cette petite montée vers le Taillefer puis la traversée. Dans cette petite montée, je me rends compte que je n’ai plus beaucoup de jus et surtout que mon breuvage isotonic passe de moins en moins bien. J’essaie un coup de fouet à la caféine. Mais la fatigue commence à bien se faire sentir: il y a 3 semaines, j’avais déjà trouver cette traversée interminable, mais là c’est encore pis… Premier gros coup moins bien psychologique et il y a encore du chemin… Je fais le dos rond, je me mets à marcher et n’arrête pas de me faire doubler. Mais aller, le ravito de Doussard n’est pas loin et j’ai presque une demie-heure d’avance sur mon planning optimiste: je gère. Mais quand même, il est où cet Oratoire qui marque la descente sur Doussard ?!
Heureusement le voilà! Comme dans mes souvenirs, la descente est rapide et j’arrive très vite à La Thuile. Mais il reste encore ces 3 km de bitume avant le ravito! Je décide de marcher, sans chercher à trottiner, il faut maintenant commencer à penser à la suite… J’arrive au ravito à 10h15, je croise ma Doudou mais elle n’a pas le droit de rentrer dans le gymnase. Et c’est tout juste si elle a le droit de me laisser mes affaires de rechange.. Super! Il n’y a pas non plus une seule chaise pour s’asseoir mais des tables avec des coureurs dessus à n’en plus finir. Heureusement les bénévoles sont au top. Je me prend tout un stock de jambon, fromage, pain et coca, car l’estomac n’est vraiment pas au mieux. A ma grande surprise, je retrouve JL! Il est arrivé 10min avant moi et se plaint du talon d’Achille qui l’enquiquine depuis plus d’1 an. Après 20min de discussions et 3 sandwiches pour moi, il décide de repartir avec moi!
Troisième partie: Doussard > Menthon-Saint-Bernard
Nous revoilà reparti à 2, mais après à peine 300m, JL se plaint du talon et hésite encore. Je l’encourage à arrêter et m’arrête à peine (sympa le pote!) Mais du coup, JL m’emboîte le pas (un mal pour un bien ?) et arrivons ensemble au pied de la montée vers le col de la Forclaz: mon juge de paix! Cette fois-ci c’est moi qui donne le rythme dans cette montée, d’abord plutôt pentue. Mais très vite JL me passe devant. J’essaie de le suivre mais il me prend très vite 10m puis 20m: la machine JL est de nouveau en marche! Pendant les 2/3 de la montée, je garde JL à porter de vue et essaie de m’accrocher tant bien que mal. Mais de plus en plus de trailers, dont pas mal de relais, me doublent sur ce petit single track où il n’est vraiment pas aisé de doubler. J’en perds mon rythme et du même coup JL. Il n’empêche, j’avais prévu 2h pour monter au col mais 1h30 me suffisent. Tout content d’arriver au col aussi vite, j’en oubli d’admirer la vue sur le lac!
Nouveauté du parcours cette année, nous redescendons sur Montmin. Assis devant mon écran, je pensais que cette petite descente serait salvatrice et me ferait du bien. Mais aujourd’hui, sur le terrain, c’est une vraie torture: mes 2 genoux me font vraiment mal et j’ai du mal à les plier dans les descentes. C’est donc en marchant que j’arrive à la Côte, où se trouve un ravito en eau. La boisson isotonic ne passant vraiment plus, je la remplace par de l’eau fraîche et remplit un peu ma gourde. Je ne le sais pas encore, mais cette fois-ci, cet arrêt imprévu sera salvateur car il va me garantir de l’eau jusqu’à Menthon.
Arrive alors la montée vers le col de l’Aulp. Dans ma tête, cette montée c’est d’abord une traversée ascendante pour rejoindre le pied de la piste puis 4 ou 5 épingles pour atteindre le châlet de l’Aulp. Aujourd’hui, il n’y a pas de soleil, donc ma crainte du caniard n’est plus. Mais malheureusement, cette montée va être un vrai chemin de croix pour moi. De la boue qui te fait reculer à chaque pas et surtout un énorme coup de moins bien: je suis obligé de m’arrêter au milieu de la montée pour avaler tout mes salées. Et quand je repars, je ne suis pas encore rasasié… Arrivé au col de l’Aulp, j’ai une vraie faim, le genre de faim qui te fait t’arrêter au restaurant pour acheter quelque chose. Mais je n’ai pas de sous et heureusement il me reste des biscuits salés.
Arrive ensuite l’enchaînement col des Nantets – Pas de l’Aulp; enchaînement que l’on peut décomposer en une petite descente technique et trois « petits coups de cul ». La petite descente menant en contrebas du col des Nantets est bien boueuse et bien glissante. Voilà une bonne excuse pour prendre mon temps et éviter une bête chute. Le premier coup de cul menant à la buvette du col des Nantets se fait au train mais la fatigue est là et le manque d’énergie se fait bien sentir. Puis vient le deuxième coup de cul, entre les épicéas, celui qui mène au dernier, au pied du Pas de l’Aulp. L’envie de s’arrêter faire une pause est omniprésente, et je n’arrive malheureusement pas à y résister … Mais un dernier effort m’emmène enfin à ce Passage. Passé le Passage, il doit bien y avoir une vingtaine de trailers, posés à essayer de reprendre des forces. Pour ma part je m’arrête juste pour prendre des photos et repart. J’essaie de redémarrer la machine pour la descente sur l’Aulp Riant dessus mais malheureusement les jambes et les genoux ne répondent pas. Un coup d’oeil à la montre, je suis en avance sur mon planning optimiste; je décide donc de ne pas forcer et de marcher tout en essayant de récupérer un peu de force.
Certains décrivent cette descente sur Villard comme « très technique » avec sa piste pentue et rocailleuse. Pour moi, elle est tout simplement horrible. Je prends mon mal en patience et après WXXX arrive enfin au ravito d’eau de Villard. Commence alors cette longue traversée vers Menthon Saint Bernard. Il y a d’abord une petite montée, puis une petite descente et encore une montée avant une descente plus longue. Nous arrivons alors à un croisement de pistes: à droite c’est la descente, à gauche c’est un « petit coup de cul », dixit le bénévole qui m’aiguille vers cette montée. Et bizarrement, contrairement à la première impression, ce petit coup de cul va me « remettre les jambes en place ». En effet, arrivé au sommet, on part très vite sur un petit single. Et là miracle, la machine repart! Je me remets à trottiner; j’arrive à tenir une bonne cadence qui me permet même de doubler un, puis deux puis trois, puis dix, voire même vingt trailers!
Ma tête est de nouveau dans la course, et arrivé au ravito de Menthon, je n’ai qu’une envie: ne pas traîner. Malheureusement j’en oublie les bonnes manières et ne trouve rien d’autre à dire qu’un « il est où mon sac ? » à Céline venu m’accueillir… Impolitesse qui me vaudra quelques remontrances…
Quatrième partie: Menthon-Saint-Bernard > Annecy-le-Vieux
Je repars assez vite du ravito, avec un moral gonfler à bloc. C’est la dernière montée et après la descente que je pourrais limite faire les yeux fermés. Malheureusement, je vais vite d’échanter lorsque pour une raison que je n’explique pas, les organisateurs ont décidé de nous faire quitter le GR qui longue le Mont Baret pour passer un chemin de traverse. Ils nous font quitter un super single pour un single tout boueux puis un monstre coup de cul encore plus boueux. Ce coup de cul me laissera d’ailleurs des traces car une fois en haut, le coulage de biele n’est pas loin et je suis obligé de m’arrêter pour manger tous les salés que j’ai sur moi. Mais je ne suis pas encore au col des Contrebandiers et les derniers mètres m’y menant seront un vrai chemin de croix. La tête est là (car je sais qu’une fois au col le plus dur sera fait) mais les jambes sont aux abonnés absents…
J’arrive tant bien que mal au col des Contrebandiers. Il reste encore à monter, mais je connais par coeur les sections, le moral remonte et arrive tranquillement à l’ancienne gare du téléphérique. Voilà, ça y est, plus de montée, l’arrivée est juste là en dessous. Plus qu’une petite traversée vers le Mont Baron et une grosse descente et ça en sera fini. Souffrant toujours des genoux, je fais cette traversée en marchant. Arrivé au Mont Baron, je pensais pouvoir me remettre à courir. Mais entre les genoux qui coincent et les racines glissantes, je préfère marcher. D’ailleurs un traileur derrière moi tombera au moins 5 fois, chose qui engendra quelques bon jurons.
Peu avant le col du Pré Vernet, je vois d’un coup sortir Sandrine du bois! Elle est montée à ma rencontre avec ses chaussures minimalistes et n’attend qu’une chose: que je cours pour qu’elle puisse les tester! Les autres à côté la prenne un peu pour une folle mais elle a au moins le mérite de me forcer à courir. Enfin, pas tout de suite, car les genoux coincent toujours sur ces descentes pentues et rocailleuses. Mais une fois passé le col du Pré Vernet, la piste devient single, les rochers deviennent racines. Bref, un terrain idéal pour relancer la machine. Et là encore, comme au dessus de Menthon-Saint-Bernard, je retrouve mes jambes et me mets à trottiner et même à courir. Je connais presque chaque épingle, presque chaque racine de ce sentier. La fin n’est plus très loin et je me remets à doubler un, deux, trois, 10, 20 traileurs, comme si je n’avais fait que 5km et non 80km!
Arrivé au bord du lac, je ne peux plus m’arrêter et court, court, court encore. J’ai même l’impression que Sandrine n’arrive plus à me suivre! Et puis la voilà, la voilà enfin cette ligne d’arrivée où toute la famille et les amis sont là pour m’accueillir! Il y a deux ans, j’étais arrivé hors délais à Doussard, mais pas cette année!