une fois n’est pas coutume, j’ai délaissé mon short et mes baskets pour un jeans et des chaussures normales pour accompagner Raph et Vincent tout le long de ce Grand Raid du Queyras. La veille du départ, j’apprécie grandement ce nouveau rôle au moment du repas en songeant que le lendemain je n’aurai pas 132km à me farcir même si je vais devoir me lever aux aurores…
Nous nous levons donc à 3h pour être au départ à 4h. Nous partons du gîte à 3h45, mais au bout de 2min, avec un calme olympien Vincent me fait remarquer qu’il a oublié son dossard… A près un demi-tour pour le récupérer et nous arrivons au départ à Aiguilles à 3h59… A peine le temps de se faire badger que le départ est donné! Bizarre pour moi ne pas prendre le départ, mais en même temps bien content de ne par partir: 132km c’est quand même long!
Première mission pour moi, aller au prochain point de passage. Mais… c’est où au fait?! Première leçon quand on suit quelqu’un: connaître le parcours comme si tu allais courir! Heureusement j’avais imprimé la veille la carte globale du parcours. Le prochain point de passage est donc à Abriès, presqu’au fond de la vallée. Une fois arrivé à Abriès, il n’y a pas grand monde (normal à 4h15 du mat!) et du coup, une question s’impose: mais où passent les coureurs ? Deuxième leçon: prendre avec soit les cartes TOP25 qui couvrent le parcours. Après un petit tour en voiture je vois enfin du monde à un croisement de routes: le trail va passer là. Je n’aurais que 10min à attendre pour voir passer les 1ers, 2min de plus pour voir Raph en forme, 1min de plus pour voir Vincent qui est aussi assez bien.
Direction maintenant le prochain point de passage à La Monta qui est aussi le premier ravit . Cette fois-ci, je n’ai aucun mal à trouver le ravito. Par contre, d’après les estimations, les 1er coureurs devraient passer dans un peu plus d’1h… Un petit somme ne ferait pas de mal. Je baisse les sièges arrières de la voiture et m’allonge, et là 3ème leçon: quand tu pars tôt le matin, prends de quoi dormir au chaud, comme un duvet par exemple… Il est 6h20 quand Raph arrive au ravito en 7ème position. Il va bien, tranquille. La traversée de la Crête de Gilly était magnifique avec vue sur le Viso. Effectivement vu d’en bas, ça fait envie. Raph pense attendre Vincent mais je lui conseille d’avancer, histoire de ne pas prendre froid. Il repart donc et Vincent finit par arriver 10min plus tard. ça va aussi pour lui et je lui indique que Raph n’est pas loin devant. Un petit coca et il repart. Il est temps maintenant pour moi de rejoindre le col Agnel. J’en profite pour passer au gîte à Moline sur la route du col pour voir que toute la petite famille est debout. Et aussi pour récupérer le portable de Raph: entre le dossard de Vincent et le portable de Raph, nos 2 compères avaient bien la tête en l’air ce matin…
Arrivé sous le col Agnel, comme pour Abriès, je recherche le point de passage. Il y a déjà un peu de monde et on voit du balisage: je n’aurais pas à tourner beaucoup. Je rejoins sur le parcours 2 ou 3 suiveurs comme moi et papote un peu. Le parcours a été modifié suite à un passage enneigé pour le rejoindre le col de Chamoussière. On s’accorde à dire que cela n’avait pas l’air de présenter énormément de risque, et que s’ils ne passent pas là cette année, sauf à modifier les dates, jamais le trail ne pourra passer par là. Mais quoiqu’il en soit, la sécurité avant tout. Je finis par remonter un peu en direction des coureurs. J’en profite pour croiser quelques marmottes et fini par arriver au niveau d’un superbe point de vue sur le Pain de Sucre d’un côté et le Pic de Château Renard de l’autre: ce sera parfait pour prendre des photos. Raph arrive 10-15min plus tard, toujours en 7ème position. Je lui indique que les 5ème et 6ème ne sont vraiment pas loin devant, mais il n’en a cure, il préfère prendre des photos. Et il a bien raison, le paysage vaut le coup! Vincent arrive 2min après, Raph n’est donc pas loin, il devrait le rattraper assez vite. Maintenant il est de nouveau temps pour moi de récupérer la voiture et d’aller au prochain point de passage, à Saint Véran. Je ne dois pas traîner, le parcours ayant été modifié, il ne faudra pas beaucoup de temps pour les coureurs pour rejoindre ce ravito.
Effectivement lorsque j’arrive à Saint-Véran, les 3 premiers sont déjà passés. Comme pour le col Agnel, je remonte le chemin jusqu’à retrouver Raph. Ils sont maintenant 2 et papottent tranquillement. Et oui, même les premiers prennent le temps de papoter… Au ravito, Raph est vraiment bien, prend son temps et pense qu’il est parti trop vite. J’informe Sandrine mais en retour je me fais un petit peu engueuler « Oui il va trop vite! C’est un ultra, il a oublié ce que c’est! ». Ok ok… La météo devrait aller en se dégradant; Raph repart avec des affaires de pluie dans le sac: on est loin du micro sac qui fait 2kg! Vincent ne devrait maintenant plus tarder mais le temps avance et toujours pas de Vincent à l’horizon. Il finit par arriver 20 bonnes minutes plus tard: il n’est pas bien, mal au ventre et marche depuis un moment. Il décide de s’allonger et repart finalement 20min après avec peu d’espoir d’aller au bout: « on va au moins essayer d’aller à Guillestre ». Le prochain point de passage et ravito est à Ceillac. Je n’ai pas prévu d’y passer afin de récupérer la famille au gîte pour aller ensuite à Guillestre, à mi parcours du trail.
Raph arrive à Guillestre à 15h10, toujours 7ème. L’étape précédente a été bien usante, les écarts en tête de course sont faits maintenant. Il souhaitait à la base faire une sieste de 10min (avec autorisation écrite par SMS de Sandrine) mais malheureusement pas de lit. Je demande à Raph ce qu’il veut à manger, à boire, quelles affaires, … Ceci me vaut un gentil chambrage des bénévoles du ravito « Pas bien efficace ce ravitailleur! », surtout quand en plus je me loupe et met la gourde de Raph à l’envers dans son sac… Il va falloir réviser quelques automatismes…. Il repart 15min plus tard, mais avec un petit peu d’inquiétude. En effet, la suite est LE plat de résistance de ce trail: le col de Furfande et sa longue montée de presque 20km… D’autant plus que très vite il se met à pleuvoir fort: qu’est-ce qu’on est bien dans sa voiture alors qu’il pleut dehors… Vincent arrive 3h plus tard, malheureusement il n’a plus l’envie de continuer: le ventre ne s’est pas remis et vu ce qui l’attend ensuite avec la nuit, c’est sans aucun doute une très sage décision. Nous remontons tous au gîte puis je repars seul en direction d’Arvieux, le prochain ravito de la course.
Raph arrive au ravito d’Arvieux à 20h. Il me paraît bien mais a eu un gros coup de moins bien pour monter à Furfande. Des coureurs le précédant sont encore au ravito. Le contraste est assez saisissant entre ces coureurs qui commencent à être atteint (un d’ailleurs abandonnera au ravito) et Raph qui semble encore en très bonne forme. Il prend le temps de bien s’alimenter et les bénévoles sont vraiment au petit soin pour servir les coureurs. Seul hic il n’a plus d’affaire sèche. Quatrième leçon: quand on te donne des vêtemens humides au ravito, ne pas les mettre en boule au fond d’un sac mais essayer de les faire sécher… Heureusement ce qu’il a sur lui fera l’affaire. Les parents de Raph, Sandrine, Vincent et même JL a Paris me demandent régulièrement des nouvelles. Raph repart du ravito en 6ème position, le 5ème n’étant pas trop loin. La nuit ne vas pas tarder à tomber et vu son état de forme, il devrait assez rapidement pouvoir rattraper les 3ème et 4ème qui sont ensemble. Une certaine euphorie s’empare de moi, mais pas de Raph, il suit son petit bonhomme de chemin
La suite se passe à la Casse Déserte où j’ai prévu de le suivre un peu jusqu’au lac Souliers. Mais avant je m’arrête à Brunissard. Il a déjà rejoint le 5ème. Raph court, le nouveau 6ème marche: une fois de plus le contraste est saisissant. Et les 3ème et 4ème sont 20min devant, cette fois c’est sûr il va les rattraper. J’arrive à la Casse Déserte au même moment où les 3ème et 4ème passent. Il me reste donc 20min pour me préparer. Au bout de 10min, je suis prêt mais le froid étant là, je décide de descendre à la rencontre de Raph. Et au surprise, je n’ai même pas le temps de faire 50m qu’il est déjà là: il a repris 10min en 2km à ses prédécesseurs! J’ai à peine le temps de sortir l’appareil photo qu’il est déjà loin. Moi qui pensait pouvoir le suivre tranquillement, c’est raté, car même après 100km, il court toujours et n’arrête pas de relancer. J’ai le malheur de donner des nouvelles à Sandrine et je me fais littéralement engueuler! « Il avait dit cool, tranquille ». Je n’ose même pas décrocher le téléphone lorsque je vois qu’elle essaie de m’appeler… La nuit commence à tomber et nous apercevons au loin les frontales des 3ème et 4ème. La magie de la nuit s’installe doucement sur le Queyras. Je sens tout de même Raph un peu fatigué qui aimerait bien que le lac arrive vite. Et il arrive assez vite. Voir même trop vite pour moi, j’aurais bien fait un peu plus de chemin… Même si je rallonge un peu en le suivant dans la descente vers Souliers, je dois assez vite le laisser partir dans la nuit qui est maintenant bien installée. Je remonte donc au lac Souliers et croise les bénévoles avec qui je discute un peu. Je leur souhaite bien du courage car la nuit s’annonce rude avec le vent et la pluie qui ne devrait pas tarder à arriver. Je repars vers la voiture et me retrouve donc seul dans une nuit bien noire. Petit moment de solitude et petite pensée pour tous ces trailers qui eux aussi sont dans la nuit et qui en ont pour encore bien plus long que moi.
Je retrouve la voiture, saute dedans et prend la direction d’Aiguilles et donc l’arrivée. L’idée est de rejoindre à pied Raph à partir d’Aiguilles et terminer à ses côtés. Mais cela fait un moment que je suis levé, la fatigue s’installe. Je décide de faire un petit somme (cette fois-ci dans un duvet récupéré au gîte). La pluie commence à tomber. On est si bien au sec… Je recule encore un peu le réveil… Pour finalement me réveiller 5min avant l’arrivée de Raph. La pluie aura eu raison de ma motivation… Raph termine finalement 4ème de ce Grand Raid du Queyras. A l’arrivée, il n’a qu’une envie: rentrer prendre une douche!
Voilà ce Grand Raid qui se termine après une bien belle journée. Au final pour moi bien content de ne pas avoir couru sous ces conditions mais avec quand même une belle envie de revenir avec un short pour faire cette première partie entre Aiguilles et Guillestre. Encore chapeau à Raph, qu’est-ce que ça doit être quand il n’y va pas cool! Et une pensée encore pour tous ces trailers qui ont affronté la pluie et le froid toute la nuit: ils ne seront que 38 à aller au bout sur les 125 partants…